
Une fois par an, le week-end, les musées ouvrent leurs portes la nuit, pour des visites exceptionnelles. Ici pas de Ben Stiller en gardien ou de statues qui reprennent vie, juste une invitation à redécouvrir gratuitement ces lieux culturels.
Cette année mon épouse penchait pour une visite au musée d’art moderne qui possède une belle collection de peintures contemporaines. J’aurai également penché pour son choix, malgré une petite préférence pour le musée de l’œuvre Notre Dame, mais le destin en a décidé tout autrement.
L’Orchestre Le Bon Tempérament jouait pour l’occasion au Palais Rohan lors de cette nuit exceptionnelle. Et il cherchait un photographe pour immortaliser le concert.
J’avais déjà couvert un de leurs concerts et c’est Sarah, la flûtiste de Toïtoïtoï, qui joue également dans l’orchestre, qui m’a sollicité, un peu à l’arrache certes, mais sollicité quand même. Et ça fait toujours plaisir qu’on se souvienne du photographe du concert. Cela signifie que soit, ils n’ont trouvé personne d’autre, soit que mon travail n’était pas si mauvais que ça finalement. Je ne préfère pas savoir quelle est la bonne réponse.
Le Palais Rohan construit au 18eme siècle abrite trois musées dont celui des beaux-arts. Des vastes pièces en enfilade avec de hauts plafonds, décorées de tableaux et meublés façon 18eme. Autant l’avouer tout de suite, photographier des musiciens dans un tel cadre me faisait très envie.

Me voilà donc parti avec mon barda vers 16h30 pour rejoindre le Palais Rohan à pied et en tram. C’était sans compter sur les footeux qui organisaient leur nuit au musée sur la place d’Austerlitz dans un grand foutoir de fumée, fusées, déguisements, gueulantes et bières. À ce qu’il paraît le Racing a perdu. Bien fait ! Ils n’avaient qu’à pas emmerder le monde. Je suis quand même arrivé à l’heure au rendez-vous en empruntant des chemins de traverses.
Mais voilà, mes rêves de belles salles classiques tombèrent à l’eau en arrivant sur place. L’orchestre allait jouer dans la cour, pas dans la salle de bal avec ses tableaux ou dans la bibliothèque.

La photographie de spectacle en extérieur, ce n’est pas vraiment mon fort. Le bon côté, c’est que je disposais d’un laissé passer pour circuler librement à peu près partout, des terrasses jusqu’aux salles d’exposition. Et je vous assure, admirer la cathédrale de Strasbourg de nuit du haut de la terrasse du Palais Rohan, ça vaut le détour.
Il y avait cinq animations musicales au Palais Rohan. Un ensemble de cuivres sur la terrasse, l’orchestre dans la cour, un premier ensemble de musique de chambre dans la bibliothèque, un second à l’entrée du musée archéologique et une harpiste dans le salon de musique du musée des beaux-arts. Autant dire que lorsqu’un ensemble terminait de jouer, il fallait se dépêcher pour aller photographier le suivant.

Je suis habitué à photographier en salle avec des projecteurs, pas aux extérieurs en plein soleil, sauf lorsque je fais du paysage. Mes premières images n’ont pas donné grand-chose, mais vers 21h, lorsque le soleil s’est couché derrière la cathédrale, j’ai commencé à trouver mes marques.
Dans la cour, quatre projecteurs bleus léchaient la façade du Palais Rohan, deux rampes de lumières en terrasse arrosaient la cour, plusieurs lanternes éclairaient les portes et chacun des pupitre des musiciens disposaient d’un lampe LED. Cela suffisait amplement pour jouer avec les lumières et pour éclairer les visages. C’est là que j’ai commencé à réaliser des clichés intéressants.

Les ensembles jouaient à plusieurs reprises dans la soirée, de 19h à 23h, tant et si bien que je savais à quoi m’attendre après un premier tour de chauffe et j’ai pu trouver les bons spots comme ce point de vue plongeant sur l’orchestre du haut de la terrasse.
Pour une fois j’ai principalement fais des plans de groupe plutôt que des portraits serrés sur les musiciens. Déjà je ne voulais pas gêner les artistes et les spectateurs en leur imposant ma silhouette dans le paysage, ensuite, je me connais, je me serais certainement concentré sur trois ou quatre personnes qui accrochent mieux l’objectif.
L’orchestre présentait au public venu nombreux, des extraits de son répertoire composé de tubes de musique classique. Un orchestre amateur certes mais formé de nombreux élèves du conservatoire qui possèdent déjà un niveau quasi professionnel. Il y avait également un quatuor qui jouait des musiques de films, hélas très mal placé, au bas des escaliers descendant au musée archéologique et face aux toilettes. Dans la bibliothèque du palais jouait un autre quatuor que je n’ai pas eu la chance d’écouter ni photographier, des musiciens aguerris comprenant la première violoniste de l’orchestre. Les cuivres, installés sur le toit sonnaient toutes les heures la marseillaise pour battre le rappel des visiteurs. Ils jouaient également d’autres pièces, mais difficile de les citer ici, je ne connais guère le répertoire des cuivres. Enfin il y avait cette jeune harpiste aussi talentueuse que timide qui livrait un délicieux récital de harpe dans le salon de musique. Les visiteurs, parcourant les salons du palais, s’arrêtaient tous, subjugués par la beauté de la musique et du lieu.

Je suis revenu à la maison vers 23h30 avec un peu plus de deux cents photos et une faim de loup (j’avais oublié de manger). Après un tri sévère, même s’il n’y a pas eu de déchet, je n’ai conservé que 33 images, le ratio habituel lors d’un concert.